Nos premières œuvres

nos premières œuvres

« Papa, maman, regardez ! j'ai enfin réussi ! – Oui, oui, c'est bien mon fils… »

Après quelques semaines à reproduire minutieusement sur papier les personnages de son dessin animé préféré, Gabriel avait enfin fini son premier véritable dessin ou “poster” comme il le disait si fièrement.

Bien qu'un peu déçu par le peu d’enthousiasme de ses parents face à ce chef-d'œuvre d'un nouveau genre, il comptait bien l'afficher au-dessus de son lit : son premier poster fait de ses propres mains !

Plus tard, dans quelques mois, il perfectionnera son art, dessinant des “posters” à chaque fois un peu plus beaux, plus détaillés, avec des formes plus précises. Ainsi, regardant sa première œuvre, il la trouvera médiocre, la décrochera du mur mais, prendra grand soin de la ranger délicatement dans son bureau.

C'était sa première œuvre, celle qui allait l'amener au sommet de son art !

Le monde des adultes

Dans un monde d'adulte, qu'advient-il de nos premières œuvres ?

Peut-être aurons-nous perdu une partie de la fougue de notre jeunesse mais, il y a fort à parier que nous déploierons autant d'enthousiasme et d'énergie que le petit Gabriel. Le résultat sera probablement le même que le sien, loin d'être parfait. Est-ce vraiment important ?

Une donnée peut changer : notre état d'esprit. Après cette sensation de bonheur liée à l'accomplissement de notre première œuvre, nous commençons à tourner la tête et regarder ce qui est fait à côté. Là, ce n'est plus la même musique.

Sans aller jusqu'à se comparer aux professionnels du genre, nous ne pouvons nous empêcher de regarder les résultats de nos voisins.

Peu nous importe qu'ils aient plus d'expérience que nous, simples novices, le résultat démontre que notre œuvre est loin d'être à la hauteur. Honteux et déçus, notre œuvre vient de perdre toute la valeur qu'elle avait à nos yeux. Un raté, parmi tant d'autres.

Tant pis, il nous reste encore un peu de motivation, continuons à nous améliorer.

Et c'est ainsi que d'autres petites œuvres voient le jour. Bien que nous ne le voyons pas forcément, notre style s'améliore, nos œuvres s'embellissent. Plus encore, nous prenons un réel plaisir dans ce que nous faisons.

Puis, vient le moment où, en regardant une énième fois chez les voisins, vous découvrez l'arrivée d'un nouveau venu. Une sorte d'extraterrestre qui, sorti de nulle part et, avec une expérience bien inférieure à la vôtre, déploie à bout de bras des œuvres d'une qualité largement supérieure… En apparence du moins.

Dégoûté, écœuré (et autre rythmes en “é”), vous laissez tomber sur un réel sentiment d'échec.

« Stop, j'arrête. Je suis trop nul ! »

Et vous êtes bien le seul à penser cela !

Un univers d'enfant

Imaginez maintenant Gabriel au trait de crayon 100 fois moins précis que celui du créateur de ses séries préférées. À même expérience, pour un même nombre d'heures passées à l'apprentissage de cet art, dessine-t-il mieux que nous ?

Probablement pas. Peu lui importe, il continue, il persévère dans son art.

En fait, je pense qu'il se moque éperdument de votre travail, aussi réussi soit-il. Il s'amuse tout simplement.

Peut-être qu'un jour, comme beaucoup d'enfants grandissant, Gabriel arrêtera de dessiner, passant à tout autre chose. Vous allez me dire alors, qu'elle est la différence entre lui et moi, il a certes persévéré un peu plus, mais au final, il en est au même point que moi.

Oui, c'est peut-être vrai, mais notre jeune ami a arrêté car il trouvait son bonheur ailleurs et non par frustration. Voilà probablement la seule et unique différence.

À chacun son rythme

« Se regarder scrupuleusement soi-même, ne regarder que discrètement les autres. » Confucius

Nous comparer inlassablement aux autres, voilà une bien mauvaise habitude qui peut gâcher notre bonheur. Après tout, pourquoi “Untel” serait plus doué que moi ? Non mais !

Il faut dire que l'univers scolaire aura bien ancré en nous ce réflexe de comparaison, gâchant ainsi tout le bénéfice de l'esprit de compétition en poussant celui-ci à l’extrême. Et c'est ainsi que sont nés de nombreux complexes.

Comment faire pour éviter de regarder sans arrêt chez les autres et surtout stopper de nous comparer à eux ?

C'est là que viennent les bons conseils de Gabriel 🙂

Afin de préserver notre persévérance, mais surtout notre estime de nous-même, apprenons à apprécier nos œuvres aussi inachevées soient-elles. Apprenons à regarder les défauts inhérents à celles-ci. Regardons les, non comme la représentation d'un manque cruel de talent, mais comme un indicateur d'améliorations à apporter.

Plus encore, prenons du plaisir à créer notre œuvre. Quel que soit le rendu final, amusons-nous, profitons de chaque instant de création. Quel que soit le rendu final !

Et pour en revenir à notre voisin talentueux, apprenons à ne plus le regarder comme un rival. Même si nous travaillons sur un même type d'œuvres que lui, notre chemin, nos objectifs ne sont en aucun cas les siens.

Apprenons à nous inspirer de lui, et non le jalouser. Pourquoi notre voisin arrive à de meilleurs résultats que nous et ce, plus rapidement, quelles sont ses stratégies ? Pouvons-nous les découvrir, nous en inspirer et les faire nôtre ?

N'oublions pas non plus que chacun avance à son propre rythme. Il se peut que nous ayons besoin d'un temps important pour apprendre les bases mais, que par la suite, nous avancions comme un bolide 🙂

Chacun son rythme et surtout chacun son chemin. Peu importe ce que fait le voisin et à quelle vitesse il court, l'important est d'avancer encore et toujours pour arriver à notre but. Et plus encore, nous faire plaisir !

Crédit photo : Cia de Foto

12 comments

  1. Le maitre d’Echizen te salue pour la qualité de ton article et de tes idées… maintenant il te prie de jeter ton ordinateur portable par dessus le mur. 😉

  2. Excellent ! Oui, et encore oui !
    Je suis tout à fait d’accord avec le message délivré : il faut arrêter de se comparer avec autrui, je trouve même qu’en faisant ceci, on a tendance a dépersonnaliser notre propre oeuvre. Il faut prendre position, et prendre du plaisir dans ce que l’on fait comme tu dis. Je reste persuadé qu’en agissant de la sorte, on sera remarqué et on sera source d’inspiration.
    J’adore ton style d’écriture Nicolas, cet article le démontre encore une fois. Bravo ! 🙂

  3. Maitre d’Echizen : non maître, s’il vous plaît, pas l’ordinateur :'(
    Etienne : C’est très bien vue. À trop regarder à côté, nous dépernonnalisons notre création pour au final ne plus nous reconnaitre dans nos œuvres.
    NB : Merci beaucoup pour le compliment 🙂

  4. Cet article est très juste.
    D’ailleurs, lorsque je lis les nombreux blogs de développement personnel, je me rend compte à quel point ils ne sont pas comparables. Chacun reflète une personnalité, un chemin et une approche très différentes. Il n’y en a pas un “mieux” que les autres au final, ils sont juste différents mais d’égale valeur.

  5. Merci Monalisa pour ton commentaire.
    Effectivement à chacun son chemin et c’est d’ailleur cette diversité d’expériences et de personnalités qui apportent le plus de richesse.

  6. article très intéressant dans le fond, cela me fait justement penser une lecture sur les oeuvres d’arts des enfants. Généralement on dit “c’est beau (et on pense le contraire), tu dessines bien, tu es doué” sans prendre du tout le temps de savoir ce que pense le mini-moi de son dessin. En fait il faut passer par le “je” et dire “j’aime bien ce que tu fais, tu peux m’expliquer ? “.
    En fait, on ouvre une discussion avec l’enfant sur ce qu’il fait, lui montrer qu’on s’intéresse à lui et à ce qu’il fait. A contrario, lui-même peut trouver son dessin nullissime et lui jeter d’emblée “c’est beau, tu as du talent sans le penser vraiment” ne lui apporte pas grand, au contraire.

  7. Je n’ai pas grand chose à ajouter à ce qui a été dit précédemment (pas assez rapide 😉 !).
    Un article plein de sagesse, une bonne piqure de rappel 🙂

  8. Franck : Ta réfection est vraiment très intéressante. De même on peut re-trouver cela au travers de nos comportements d’adules, du genre :
    – je me trouve gros/grosse
    – mais non tu n’es pas gros/grosse
    Identiquement, malgré notre envie de rassurer, cela n’apporte rien. Alors que si nous tentons de nous intéresser un peu plus au réel problème de valeur, nous pourrons aider la personne concernée à avancer et croire en elle.
    Une bonne piste à étudier, merci Franck 🙂
    Joanne : Comme disait l’autre : « Pas assez rapide petit scarabé » ^^

  9. C’est interessant que je me retrouve à lire l’exemple de ton petit gabriel au moment même ou j’écoute l’un des artistes musicaux favoris en me disant que j’aurais du mal à arriver à son niveau. Il n’est rien que je ne sache pas dans ce que tu écris, mais beaucoup de choses qui valent la peine d’être rappelées, sans cesse.

  10. Julien : Oui tout as fait, c’est le genre de conseils simples que l’on oublie que trop fréquemment.
    NB : Il faudra que tu nous fasses un jour partager tes talents musicaux 😉

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